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La collectionBibliographie
Giuseppe Penone. The Inner Life of Forms, New York, Gagosian, New York, Rizzoli, 2018.
Bernard Fibicher (dir.), Giuseppe Penone. Regards croisés, cat. exp. Lausanne, Musée cantonal des Beaux-Arts, Milan, 5 Continents Editions, 2015.
Françoise Jaunin, Giuseppe Penone : le regard tactile [entretiens], Lausanne, La Bibliothèque des Arts, 2012.
Une jeunesse passée à la campagne a forgé chez Penone une sensibilité aux liens qui unissent l’être humain et la nature, et aux empreintes souvent invisibles laissées par l’un sur l’autre. L’artiste en a fait son thème. A occhi chiusi (Les yeux fermés), créé un demi-siècle après ses premières œuvres, constitue une synthèse parfaite de ses recherches.
La partie médiane de ce grand triptyque est réalisée à partir d’une plaque de marbre blanc dont les veines sont dégagées. Penone nous fait découvrir la vie intérieure de la pierre, qui apparaît comme un agrandissement de la peau humaine : une surface qui évoque une profondeur, mais, de façon contradictoire, comme « à fleur de peau ». De part et d’autre de la plaque, l’artiste a dessiné d’immenses yeux clos avec des épines d’acacia. Il partage le credo cher aux surréalistes : lorsque l’on a les yeux fermés, notre imagination – littéralement la faculté de se représenter des images – est plus grande que jamais. Or les yeux sont figurés ici en négatif : les cils sont blancs et les paupières apparaissent comme des trous noirs. La vue se trouve donc doublement inversée : aveuglement d’une part, inversion de la lumière d’autre part, avec pour conséquence un champ de vision illimité.
Les milliers d’épines d’acacia, dont les pointes sont dirigées vers le public, ne représentent pas le regard pénétrant de l’artiste, comme dans Pointe à l’œil (Relations désagrégeantes) (vers 1931-1932, Paris, Centre Pompidou), œuvre surréaliste d’Alberto Giacometti, mais plutôt l’étendue presque infinie des points de contact de la peau et des terminaisons nerveuses susceptibles d’enregistrer des empreintes. Le corps ainsi symbolisé par le relief mural inclut le minéral, le végétal et l’humain, un corps dans tous ses états, une interface permettant de se connecter au monde.