Bibliographie
Silvie & Chérif Defraoui – Archives du Futur, catalogue raisonné numérique : https://archives-du-futur.ch/, Vufflens-le-Château, Association Archives du Futur Defraoui, 2021, cat. 40.16.1-30.
Jean-Paul Fellay et Olivier Kaeser (éd.), Silvie Defraoui. Things Are Different from What They Are Not, cat. exp. (titre de l’exposition : Silvie Defraoui. Sombras eléctricas) Paris, Centre culturel Suisse, 2009.
Denys Zacharopoulos, Daniel Kurjakovic et Konrad Bitterli, Defraoui. Archives du futur 1975-2004, cat. exp. Saint-Gall, Kunstverein St. Gallen Kunstmuseum, Genève, Mamco, Thessalonique, Macedonian Museum of Contemporary Art, Nuremberg, Verlag für moderne Kunst, 2014, p. 158-159.
Das Bild im Boden est une série de plus d’une centaine d’œuvres (1986-2015), qui s’inscrit dans le cadre des Archives du futur, initiées en 1975 par Silvie et Chérif Defraoui et poursuivies par Silvie seule, à la mort de son époux en 1994. Chaque œuvre consiste en un ou plusieurs carreaux de sol en ciment, rehaussés d’adhésifs en forme de rond, de rectangle, de carré, de ligne ou de triangle. Ils sont présentés au mur sur un support en bois. Ces carreaux, irréguliers de par leur fabrication, abîmés de par leur usage, ont été ramassés par Silvie Defraoui au fil des ans, près de Barcelone, sur des chantiers de rénovation d’immeubles et dans une entreprise de récupération d’éléments architecturaux.
Par le simple ajout de quelques éléments géométriques, l’artiste interfère avec le caractère ornemental originel de chaque carreau, l’exacerbe et le redynamise puisqu’elle évoque des visages au moyen d’un langage extrêmement simple tirant parti de ces « matrices ». Dans le catalogue raisonné des Archives du futur, Defraoui note au sujet de Das Bild im Boden, qui signifie « L’image dans le sol » : « Depuis la nuit des temps des visages apparaissent dans les nuages, dans les lacs et aussi dans les taches sur les vieux murs. » Ce constat renvoie au fait que les images n’existent pas sans le regardeur et qu’elles naissent parfois de son interprétation subjective. Cependant, contrairement aux images que l’on peut déceler dans les nuages et qui incombent à notre perception, celles créées par Defraoui sont intentionnelles.
Tout est ainsi fait pour que nous lisions un visage dans ces carreaux, nous rappelant, comme l’écrit Dario Gamboni en 2009, que « l’ornement n’est jamais loin de l’image ». Lorsqu’elle a débuté cette série, Defraoui réagissait également au succès rencontré par le courant abstrait Néo-Géo notamment dans la région lémanique et tenait à retracer l’origine de l’abstraction qu’elle attribue à l’ornement islamique. Ces carreaux trouvés en Espagne sont en effet l’expression d’une influence orientale, tout en évoquant, de par leur modification, d’autres cultures visuelles comme la pictographie.