Bibliographie
Stéphanie Guex et Laurence Schmidlin (dir.), Impressions et dessins, cat. exp. Le Locle, Musée des beaux-arts, Berne, Benteli, 2010.
Marco Costantini, Jean Crotti. Se perdre dans ses yeux, cat. exp. Lausanne, Musée cantonal des Beaux-Arts, Sulgen, Niggli, 2009.
Après une année d’études en lettres à l’Université de Lausanne, Crotti passe par l’École des beaux-arts de Genève (1977-1979). Avec d’autres jeunes artistes qui marqueront la scène vaudoise, comme Alain Huck et Jean-Luc Manz, il co-fonde le collectif M/2 qui aura une activité d’exposition et d’édition à Vevey entre 1987 et 1991. Dans les années 1980, il pratique une peinture figurative dans le sillage des Neue Wilde et de la Transavangardia. La représentation des hommes est déjà au centre de son travail, mais la violence propre au courant expressif dans lequel il s’inscrit cédera à une approche plus sensuelle et délicate. Ce changement s’opère alors qu’il puise des figures masculines à l’allure élégante dans les pages des magazines de mode italiens, façon Pop art.
Crotti dessine, grave et peint des hommes à partir de différentes sources iconographiques (revues, photographies privées, cartes postales, etc.). Il justifie son recours à des images préexistantes par son manque de virtuosité. Il se concentre ainsi sur son sujet qu’il recopie par décalque ou par projection. Il s’en tient parfois à des contours, restituant simplement une silhouette. D’autres fois, comme ici, il travaille de manière plus picturale, trace des hachures, colorie, et conserve quelques éléments du décor.
En trente ans, les techniques ont varié, de même que les supports, souvent récupérés (cartons dépliés, vieilles couvertures, plateaux de table, etc.), notamment depuis ses voyages au Caire (1991-2002) où l’abondance des ressources matérielles est moindre, mais le projet de Crotti est resté le même. L’artiste évoque inlassablement son désir pour les hommes. Il se montre attentif aux poses, aux corps, à la jeunesse, et particulièrement aux regards qu’on lui adresse. Aguicheur, le corps piégé dans l’étroitesse d’un panneau de bois, Igor semble avoir conquis l’artiste et chercher à nous conquérir à notre tour. Le charme d’une rencontre possible et l’ambiguïté du jeu de la séduction sont fixés sur cette planche comme un souvenir fragile.