Exposé actuellement
La collectionBibliographie
François Blanchetière (dir.), L’Enfer selon Rodin, cat. exp. Paris, Musée Rodin, Norma Éditions, 2016, n° 145.
Dominique Lobstein, « Antony Roux et Alfred Baillehache-Lamotte, collectionneurs de Rodin », in Bulletin de la Société de l’histoire de l’art français 2001, 2002, p. 325-350.
Cette sculpture pourrait avoir été inspirée à Rodin par les combats des damnés contre les serpents décrits par Dante. Au chant XXV de la Divine Comédie, on lit : « Les trois ombres étaient toujours devant moi, lorsqu’un serpent qui rampait sur six pieds s’élance vers l’un des coupables, et s’attache tout entier à lui. »
L’œuvre frappe par le rendu impeccable d’une anatomie masculine, par l’expression dramatique d’un homme luttant contre un animal, et par le modelé puissant et sensible d’un corps renversé en arrière, qui en fait un exemple frappant de l’influence de Michel-Ange. L’Antiquité est convoquée dans la référence manifeste au groupe hellénistique du Laocoon. Surtout, le sujet est indissociable des deux cents figures et groupes élaborés au fil des ans par Rodin pour sa Porte de l’Enfer, une commande passée en 1880 par l’État français et demeurée inachevée. Au sein de ce véritable vivier, dans lequel l’artiste puise inlassablement pour de nouvelles créations, L’Homme au serpent est à rapprocher de L’Homme qui tombe (vers 1883), une figure accrochée au linteau de cette Porte dans la version en bronze coulée après sa mort.
Le plâtre de L’Homme au serpent (vers 1882-1883, Williamstown, USA, Clark Art Institute) est repéré par le collectionneur Antony Roux dans l’atelier de Rodin en 1885. Ce fervent admirateur a pour habitude d’exiger d’être le propriétaire exclusif de ses acquisitions. Le 28 janvier 1887, il écrit au maître : « Vous m’avez demandé deux mille francs pour l’homme au serpent, poussé et coulé en bronze. J’accepte [à la condition] que je resterai seul possesseur de ce groupe l’homme luttant contre le serpent. Vous vous réservez le droit d’utiliser la figure de l’homme mais avec des modifications dans la pose et sans le serpent. » Rodin accepte, raison pour laquelle ce bronze fondu par François Rudier n’existe qu’en un unique exemplaire, et constitue dès lors une œuvre tout à fait exceptionnelle.