Aloïse (Aloïse Corbaz, dite)
La Couronne Impériale de la terre royale. Cahier Pâques 1943, 1943

  • Aloïse (Aloïse Corbaz, dite) (Lausanne, 1886 - Gimel, 1964)
  • La Couronne Impériale de la terre royale. Cahier Pâques 1943, 1943
  • Mine de plomb et crayons de couleur sur papier, 24,5 x 66 cm
  • Dation de l’hoirie Jacqueline Porret-Forel, 2016
  • Inv. 2016-070
  • © Musée cantonal des Beaux-Arts de Lausanne

Aloïse est âgée de cinquante-sept ans et internée à l’asile de Gimel depuis vingt-trois ans lorsqu’elle illustre les vingt pages de ce cahier de dessin, support qu’elle utilise régulièrement dès la fin des années 1930. Toujours à la recherche de plus grands formats, elle travaille ici sur une double page, à la mine de plomb et aux crayons de couleur qu’elle mouille de sa salive pour obtenir une pâte couvrante.

Ce dessin a été réalisé à Pâques, une des fêtes préférées d’Aloïse. Comme le plus souvent, les thèmes abordés mêlent souvenirs personnels et culture savante, le tout disant ses joies et ses chagrins, et surtout révélant cette vie parallèle au quotidien de l’asile, où elle construit au fil des ans un univers certes fantasmatique, mais d’une grande complexité et d’une forte cohérence.

Le sujet a été travaillé horizontalement et verticalement. Sur la hauteur se déploie le corps regorgeant de fleurs d’une femme rousse vêtue d’une robe à longue traîne rouge et agenouillée sur un coussin. Ses yeux, comme ceux de tous les personnages, sont masqués de bleu, couleur qu’Aloïse associe au théâtre. Cette « impératrice » tient une palette de peintre où les couleurs sont des œufs de Pâques multicolores. Devant elle, un tableau sur un chevalet montre le buste d’un beau roi blond et une mappemonde irisée. Lu sur sa largeur, le dessin porte la mention : « Ô Corse île d’amour », succès du chanteur de charme Tino Rossi. Le corps de la femme s’est transformé en couvercle d’une grande barque dont la figure de proue est une sirène et où sont rassemblés nombre de petits couples en tenue de gala, prêts à danser un quadrille. Le texte évoque le jeu de la bague d’or. Il convoque de grands présidents et généraux (Napoléon, Roosevelt, Wilson), un écrivain (Goethe), un peintre rococo (Boucher) et, surtout, la musique classique (Mozart, les opéras Ossian, La Walkyrie et Marie Stuart), Aloïse ayant rêvé dans sa jeunesse de devenir cantatrice.

Bibliographie

Jacqueline Porret-Forel, assistée de Céline Muzelle, Aloïse Corbaz (1886–1964). Catalogue raisonné électronique (www.aloise-corbaz.ch), Chigny Fondation Aloïse, Zurich, Institut suisse pour l’étude de l’art, 2012, n° 77.04.

Jacqueline Porret-Forel et Céline Muzelle, avant-propos de Pascale Marini, Sarah Lombardi et Catherine Lepdor, Aloïse. Le Ricochet solaire, Milan, 5 Continents Editions, 2012.

Jacqueline Porret-Forel, Aloïse et le théâtre de l’univers, Genève, Éditions d’Art Albert Skira, 1993.