Bibliographie
Laurence Schmidlin (éd.), Jorge Macchi. La Cathédrale engloutie, Lausanne, Musée cantonal des Beaux-Arts de Lausanne, 2020 (coll. Espace Projet, n° 2).
Inés Katzenstein, Rodrigo Moura et Agustín Pérez Rubio, Jorge Macchi. Perspectiva, cat. exp. Buenos Aires, Museo de Arte Latinoamericano de Buenos Aires, 2016.
Dans ses œuvres, quel que soit leur médium, Macchi joue avec la perception du spectateur, au moyen de différentes stratégies. Les éclats de lumière projetés par une boule à facettes se révèlent être des entailles dans le plafond et sur les murs (Still Song, 2005, Téhéran, Honart Museum) ; une table en bois repose dans la pénombre sur un matelas qui donne l’illusion d’être son ombre (Bed and Breakfast, 2006) ; ou encore, un double chandelier mural éclaire une portion du mur, révélant un motif de tapisserie peint, alors qu’il est éteint (Hotel, 2007). En tendant ces pièges visuels au public, l’artiste vise non seulement à produire chez lui un effet de surprise, mais aussi à le placer dans un cadre fictionnel, en le confrontant à des objets familiers (horloges, instruments, cartes, meubles, etc.) mis en scène de manière inhabituelle, sans que rien n’y paraisse à première vue. Il réalise également de nombreuses aquarelles, dans lesquelles il met en œuvre des jeux de double et exploite la fluidité du médium pour « faire » apparaître et disparaître ses motifs.
L’œuvre La luz (2015) est représentative d’un corpus de découpages réalisés par l’artiste depuis de nombreuses années. Par un geste simple, Macchi a supprimé tous les titres et blocs de texte d’un journal colombien, vidant le quotidien de son contenu pour n’épargner qu’un seul mot, La luz. Les différentes grilles ainsi créées se superposent et produisent de la profondeur dans un objet plan, invitant à interpréter la disparition du langage à la faveur de « la lumière » qui surgit lorsque l’actualité, bien souvent sombre, s’éclipse. On peut aussi regarder cette œuvre comme une série de fenêtres traversées de part et d’autre par la lumière. La fenêtre est un motif éminent de l’iconographie occidentale. Elle évoque autant les recherches sur la perspective à la Renaissance que la conception du tableau comme fenêtre ouverte sur le monde. Enfin, la structure de l’œuvre renvoie également à la grille emblématique de l’art moderne.