Bibliographie
Marina Ducrey, avec la collaboration de Katia Poletti, Félix Vallotton, 1865-1925 : l’œuvre peint, 3 vol., Lausanne, Fondation Félix Vallotton, Zurich, Institut suisse pour l’étude de l’art, Milan, 5 Continents Editions, 2005, n° 1376.
Vallotton arrive à Cagnes le 24 novembre 1920. Peint vers le début du mois de décembre, ce tableau est l’un des premiers réalisés lors de son séjour. Le village lui-même, où Auguste Renoir s’était installé quelques années auparavant, est l’un des motifs de prédilection de l’artiste. La lumière méridionale, l’éclairage fortement contrasté, l’enchevêtrement des ruelles étroites, les murs de pierres sèches lézardés, mais aussi les chemins caillouteux, les collines lointaines, la végétation faite d’herbe sèche, de pins ou de palmiers, sont les sujets qui conviennent à l’expression entièrement renouvelée de sa peinture.
À Marseille, vingt ans plus tôt, Vallotton s’était attaché au pittoresque des scènes de rues, au charme des activités insouciantes de la bourgeoisie. À Cagnes, l’animation urbaine fait place à une ambiance intemporelle, au silence. Hommes, femmes et enfants ne sont plus que de minuscules silhouettes perdues au loin, ou retranchées dans l’ombre d’un mur ou d’un arbre, quand l’humain n’a pas complètement déserté des rues que rien ne semble pouvoir réveiller. Le traitement de la lumière aussi a changé. Elle se colore de tons chauds, ici essentiellement des ocres, qui contrastent avec la grisaille des parties ombrées.
Alors que dans les tableaux peints dans le sud de la France à l’hiver 1901, l’ombre projetée était la retranscription d’une réalité observée, Vallotton l’utilise désormais pour asseoir les lignes de force d’une composition savamment structurée. Le paysage est « composé » par un agencement de formes géométrisées et de masses colorées traitées en aplats nuancés.