Bibliographie
Marina Ducrey, avec la collaboration de Katia Poletti, Félix Vallotton, 1865-1925 : l’œuvre peint, 3 vol., Lausanne, Fondation Félix Vallotton, Zurich, Institut suisse pour l’étude de l’art, Milan, 5 Continents Editions, 2005, n° 345.
Sasha M. Newman (dir.), Félix Vallotton, cat. exp. Lausanne, Musée cantonal des Beaux-Arts, Paris, Flammarion, 1992.
Dans la seconde quinzaine du mois de janvier 1901, Vallotton et son épouse Gabrielle font escale à Marseille alors qu’ils se rendent à Cannes à l’invitation de leur ami le peintre Édouard Vuillard. De retour à Paris, le port méditerranéen inspire à Vallotton deux vues depuis la terrasse du parc du Pharo située en contrebas du palais éponyme construit pour Napoléon III : l’une sur le Vieux-Port (Le port de Marseille, 1901, coll. privée), l’autre – le présent tableau – orientée vers l’ouest, avec en arrière-plan le golfe de Marseille et la chaîne de l’Estaque.
Si l’artiste, très certainement en s’appuyant sur une étude préalable au crayon – et peut-être aussi sur une photographie réalisée avec l’appareil Kodak acheté en 1899 –, respecte la topographie du lieu, il n’hésite pas à la simplifier et à en aplatir la profondeur par l’élévation de l’horizon. Cette synthétisation et cette bidimensionnalité le montrent encore attaché aux principes qui régissent l’esthétique des Nabis ; il en va de même de l’utilisation de couleurs mates et saturées, qui éliminent toute sensation d’épaisseur atmosphérique, du traitement des éléments naturels par plans colorés et des formes générales hâtivement circonscrites, parfois en laissant tout simplement le carton en réserve, autant de caractéristiques qui donnent beaucoup de spontanéité à ce paysage.
Quelques promeneurs serrés dans d’élégants habits d’hiver, des hommes aux melons vissés sur la tête, une femme en longue jupe et caraco, des enfants en costumes marins, un chien en goguette, apportent une touche anecdotique au tableau. L’apparition dispersée de leurs corps tronqués par la pente évoque le théâtre de marionnettes, leurs silhouettes bien découpées rappellent les figures en zinc du théâtre d’ombres qu’appréciait Vallotton.