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La collectionBibliographie
Laurence Madeline (dir.), Courbet. Les années suisses, cat. exp. Genève, Musée Rath/Musées d’Art et d’Histoire de Genève, Genève, Musées d’Art et d’Histoire, Paris, Artlys, 2014, cat. 14.
Jörg Zutter (dir.), en collaboration avec Petra ten-Doesschate Chu, Courbet – Artiste et promoteur de son œuvre, cat. exp. Lausanne, Musée cantonal des Beaux-Arts, Stockholm, Nationalmuseum, Paris, Flammarion, 1998, cat. 41.
Alan Bowness et Marie-Thérèse de Forges, Gustave Courbet (1819-1877), cat. exp. Paris, Grand Palais, Paris, Éditions des musées nationaux, 1977, cat. 118.
Dès le début des années 1840, les tableaux de Courbet expriment tout à la fois les aléas de l’histoire collective et les tourments intimes de l’artiste. Ses paysages et ses natures mortes en particulier en disent plus que l’apparente banalité de la réalité observée. Les dernières années de sa vie, ses représentations de truites encore vivantes mais captives ou de pommes rouges mais rongées par les vers traduisent tant les rêves avortés de la Commune de Paris que le tour tragique qu’a pris sa destinée personnelle.
C’est que, dès 1871, sa situation s’est faite précaire. Socialiste et démocrate convaincu, Courbet a participé à la Commune de Paris aux côtés de ses amis proudhoniens. Arrêté en juin, il a été condamné à l’incarcération pour avoir incité à la destruction de la colonne Vendôme. En 1873, on exige qu’il paie les frais de rétablissement du monument, et il n’aura d’autre choix que de s’exiler en Suisse.
Peint probablement dans sa Franche-Comté natale ou d’après un souvenir de celle-ci, ce Vieil arbre dans la gorge se fait l’écho de cette époque tourmentée, à l’instar des arbres menacés par la tempête d’Honoré Daumier et de Jean-François Millet. Ici, un ruisseau stagne au fond d’une gorge sombre et étroite. Au bord de son eau noire, un arbre noueux survit aux intempéries en s’agrippant à un rocher. C’est sur ses racines desséchées que tombe la lumière argentée qui vient transpercer ce paysage presque nocturne. On ne peut s’empêcher de penser que Courbet s’identifie à cet arbre décharné, tout comme, quelques années auparavant, au vigoureux Chêne de Flagey (1864, Ornans, Musée Courbet). La gorge, jusqu’alors Arcadie rafraîchissante, n’est plus qu’un ravin étroit éclairé par les dernières lueurs d’un jour d’orage. L’emploi de tons sombres appliqués au couteau à palette et une touche âpre accentuent le caractère dramatique de ce morceau de nature.