Bibliographie
Danièle Roussel, L’Actionnisme viennois et les autrichiens, Dijon, Les presses du réel, 2008 (coll. Bibliothèque art action pensée), p. 22-29.
Ralf Beil (dir.), Le Monde selon François Dubois, peintre de la Saint-Barthélémy, Les Cahiers du Musée des Beaux-Arts de Lausanne n° 13, 2003, cat. 46.
Erika Billeter (dir.), Chefs-d’œuvre du Musée cantonal des Beaux-Arts, Lausanne. Regards sur 150 tableaux, Lausanne, Musée cantonal des Beaux-Arts, 1989, p. 280.
Brus est l’un des représentants de l’actionnisme viennois, aux côtés d’artistes comme Otto Muehl et Hermann Nitsch. Ce mouvement, qui s’épanouit au cours des années 1960, se caractérise par la violence des actions menées par ses protagonistes en réaction au conservatisme de la société autrichienne. Comme les expressionnistes autrichiens Oskar Kokoschka ou Egon Schiele avant eux, les actionnistes cherchent à libérer l’être humain de ses tabous, comme la sexualité, et à débusquer les pulsions dont le refoulement a conduit d’après eux à la montée du fascisme.
Brus est l’auteur de performances qui mettent à mal son propre corps. Les images de Jackson Pollock intensément engagé dans le processus de création, surplombant sa toile un pinceau à la main et un pot de peinture dans l’autre, l’amènent à rechercher cette tension dans sa pratique picturale en restreignant les moyens expressifs à son seul corps : si l’art est énergie, il peut donc se réduire à une action. Après avoir été le support de la peinture, le corps de Brus est exposé nu, mutilé ou encore maculé de ses sécrétions, dans des performances qui dénoncent les normes de la société par le dégoût qu’elles provoquent.
Brus renoue avec une pratique graphique au début des années 1980. Ce dessin fait référence à la censure dont sont victimes les actionnistes viennois, régulièrement arrêtés par la police. L’artiste, que l’on reconnaît à son profil et à son crâne nu, se représente la bouche cousue comme s’il n’était plus autorisé à s’exprimer. Sa figure est précédée d’une silhouette dans la pénombre, renvoyant au double « Nacht » (Nuit) du titre. Le dessin a été réalisé avec des gestes énergiques – traits de crayon appuyés et nerveux. Les dépôts de craie grasse qui ont maculé le papier lui donnent un caractère peu soigné, expression littérale des forces débridées de l’inconscient.