Bibliographie
Béatrice Aubert-Lecoultre, Carinne Bertola et alii, François Bocion. Au seuil de l’impressionnisme, cat. exp. Vevey, Musée Jenisch, Milan, 5 Continents Editions, 2006.
Michel Reymondin, Catalogue raisonné de François Bocion, Wormer, Inmerc, 1989, n° 193.
Paul Budry, François-Louis Bocion : le peintre du Léman, Lausanne, Spes, [1925].
Sur cette toile de format important, Bocion représente le village de Saint-Saphorin, reconnaissable au faîte inachevé du clocher de son église. Le vignoble en terrasses du Lavaux, encore brunâtre, et les Préalpes vaudoises partiellement recouvertes de neige indiquent la sortie récente de l’hiver. Le paysage se reflète sur la surface inhabituellement calme du lac Léman que seul le sillage des mouettes vient troubler.
Alors que dans son œuvre de jeunesse le cadrage était généralement resserré sur des scènes familières ou sur les travailleurs du lac, Bocion l’élargit peu à peu dès les années 1880, privilégiant désormais la transcription du paysage lémanique. La présence humaine se fait plus rare : relégués au second plan, la barque occupée par deux pêcheurs et le bateau à voiles latines chargé de pierres sont ici anecdotiques. La simplification des lignes et la géométrisation des formes, visible dans le traitement des édifices de Saint-Saphorin ou dans le modelé des montagnes, sont caractéristiques de cette période, de même que l’éclaircissement de la palette.
La comparaison avec une petite étude préparatoire datée du 24 avril 1888 et conservée au Musée met en lumière l’important travail de composition effectué par l’artiste lors de l’élaboration de ses tableaux ambitieux en atelier. En effet, regrettant l’absence d’animation au premier plan des paysages lémaniques, Bocion utilise tout un répertoire de motifs pour y remédier. Comme l’explique le critique Paul Budry, « il garde dans un coin de chambre une brouettée de cailloux qu’il fait poser pour rendre ces bancs de roche à fleur d’eau, premier plan obligé de ses tableaux de musée. Et peut-être une ou deux mouettes empaillées. » Cette toile remportera une médaille d’argent à l’Exposition universelle de Paris de 1889 sous le titre Mouettes du Léman.