Inconnu [Suisse occidentale]
Sainte Anne enseignant la Vierge, vers 1550-1580

  • Sainte Anne enseignant la Vierge, vers 1550-1580
  • Bois polychromé, 77 x 40 x 27 cm
  • Legs d’Henri-Auguste Widmer, 1939
  • Inv. 215
  • © Musée cantonal des Beaux-Arts de Lausanne

Absents de la Bible, Anne et Joachim, les parents de Marie, sont mentionnés dans des textes apocryphes. Le culte de sainte Anne se développe en Occident au moment des croisades, lorsque des reliques sont ramenées d’Orient où elle est vénérée depuis le VIe siècle. Dans la seconde moitié du XVIe siècle, cette vénération connaît un nouvel essor, en particulier dans le contexte de la Contre-Réforme. Anne rencontrant Joachim à la porte d’Or, ou encore enseignant les textes sacrés à Marie, sont les épisodes de sa vie les plus fréquemment commandés aux peintres et sculpteurs. L’éducation de la Vierge demeurera un thème illustré par les artistes jusqu’au XIXe siècle, où il servira à promouvoir l’instruction des filles.

Dans ce groupe en bois protobaroque, sculpture applique ou partie d’un retable, sainte Anne est représentée instruisant Marie. Le livre est tenu ouvert à la fois par l’enfant et par sa mère, qui l’entoure d’un bras protecteur. Toutes deux le tendent au fidèle, qu’elles encouragent à sa lecture, allusion aussi au rôle d’intercesseur des saints.

Cette sculpture est encore fortement marquée par le gothique tardif, notamment dans les visages arrondis, dans l’attitude raide et dans les drapés des vêtements, creusés d’ombres profondes. Toutefois, des éléments baroquisants apparaissent. Les volumes s’étoffent, donnant une plus grande assise aux figures. Les drapés commencent à dévoiler le corps par endroits, mais ils le cachent encore sous une abondance de plis cassés sur lesquels vient jouer la lumière. Un dialogue encore timide s’amorce entre les corps et les vêtements.

Cette pièce – exceptionnelle parce qu’elle a conservé en grande partie sa polychromie d’origine – était l’une des plus importantes de la collection d’Henri-Auguste Widmer. Ce médecin lausannois avait constitué au début du XXe siècle un des rares ensembles privés de statuaire médiévale de Suisse romande.

Bibliographie

Peter Felder, « Im Schlepptau von Gotik und Manierismus », in Peter Felder, Luzerner Barockplastik, Luzern, Raeber, 2004, p. 12-26.

Laurent Golay, « La collection de sculptures médiévales d’Henri-Auguste Widmer », in Jörg Zutter et Catherine Lepdor (dir.), La collection du Dr Henri-Auguste Widmer au Musée cantonal des Beaux-Arts de Lausanne, cat. exp. Lausanne, Musée cantonal des Beaux-Arts, 1998, p. 113-121, n° 79.

Erika Billeter, avec la collaboration de Chantal Michetti-Prod’Hom et Verena Villiger, Sculptures du Musée cantonal des Beaux-Arts Lausanne, Lausanne, Musée cantonal des Beaux-Arts, 1990, p. 28-29.