Bibliographie
Nicole Schweizer (éd.), Jean Otth. Travaux 1964-2013, cat. exp. Lausanne, Musée cantonal des Beaux-Arts, Zurich, Scheidegger & Spiess, 2020.
Jean Otth, Échec et Scotome, Lausanne, art&fiction, 2020 [1ère éd. : Paris, 2007].
Jean Otth. Travaux vidéo 1970-1980, cat. exp. Genève, Centre d’art contemporain, 1980.
Après des études à l’École des Beaux-Arts de Lausanne (1961-1963), Otth se consacre dans un premier temps à la peinture. Il multiplie les expérimentations formelles, entre autres en s’attachant à renouveler les supports et les techniques classiques. Il travaille tout d’abord avec du sable sur des panneaux de bois et, dans la seconde moitié des années 1960, applique de la peinture – parfois au pinceau, mais aussi à l’aide d’un spray – sur des toiles, puis bientôt sur des miroirs.
Dès la fin des années 1960, il réalise ainsi une série de miroirs montés dans des cadres de bois et partiellement recouverts de peinture noire. Les formes simples, presque abstraites qu’il y peint, rappellent le plus souvent des silhouettes de montagnes, le paysage étant alors son sujet de prédilection. Otth s’intéressait à la confrontation entre le signe peint et la réalité réfléchie dans le support, entre la profondeur sans cesse renouvelée du reflet et la constance de l’à-plat noir. En 2007, dans un texte où il jette un regard rétrospectif sur l’ensemble de son travail, il compare le voisinage de ces deux modalités de représentation à un « collage » qui a pour effet de générer une extension de la surface picturale : non seulement l’artiste se voit dans le miroir lorsqu’il peint, réalisant ainsi un autoportrait éphémère, mais il initie de plus un dialogue entre la composition noire, le support réfléchissant, et l’environnement immédiat de l’œuvre qui s’y trouve intégré. Ainsi, le miroir devient « une véritable machine lumineuse qu’activ[ent] toutes les variations du jour ».
Dans ce miroir-ci, Otth renonce au pinceau pour privilégier une peinture laquée appliquée au spray. Il équilibre les parties sombres et lumineuses en créant une composition presque géométrique, coupée en son centre par un axe vertical en réserve. Dans la partie inférieure, un monticule noir recouvre entièrement le support. Cette forme est surmontée de gouttelettes de peinture qui semblent s’en évaporer et s’étendent en constellations irrégulières jusqu’à la partie supérieure du miroir, rendant poreuse la frontière entre la « réalité » de la peinture et celle des reflets dans le support.