Bibliographie
Katia Poletti (dir.), Félix Vallotton illustrateur. Catalogue raisonné en ligne, Lausanne, Fondation Félix Vallotton, Lausanne/Zurich, Institut suisse pour l’étude de l’art (SIK-ISEA), 2025.
Hervé Joubeaux et Hélène Oblin (dir.), Portraits de Mallarmé, de Manet à Picasso, cat. exp. Vulaines-sur-Seine, Musée départemental Stéphane Mallarmé, 2013.
Marie-Pierre Salé, «Le Livre des Masques: « Je ne vois pas ce qui est ; ce qui est, c’est ce que je vois», in Édouard Papet, Masques. De Carpeaux à Picasso, Paris, Hazan, musée d’Orsay, 2008, p. 136-145.
Au tournant du siècle, Vallotton réalise quelque 400 portraits de personnalités illustres, pour la plupart contemporaines. Ces petits dessins à l’encre de Chine sont commandés par des revues telles Le Mercure de France, La Revue des Revues, ou encore Le Cri de Paris, et reproduits photomécaniquement. Ils recourent à la même synthèse formelle, aux mêmes oppositions radicales entre plages noire et blanche que la gravure sur bois, une technique dans laquelle l’artiste est passé maître dès le début des années 1890.
L’appellation communément donnée à cette production prolifique est due à Rémy de Gourmont: «Vous convient-il pour vos têtes le mot masque ?», s’enquiert l’écrivain au moment de publier son Livre des Masques. Portraits symbolistes, un ouvrage en deux volumes (1896 et 1898) qui en reproduit 53. Vallotton ne peut qu’acquiescer, sa quête graphique de l’essentiel rejoignant les préoccupations de l’écrivain anti-naturaliste, allergique tant au détail qu’à l’anecdote.
L’artiste réalise trois masques de Stéphane Mallarmé. Le premier dessin, dit aux yeux fermés, est reproduit en cul-de-lampe dans la Revue franco-américaine de juillet 1895. Le deuxième, aux yeux mi-clos, sur fond de nuage, paraît en août 1895 dans la revue américaine The Chap Book qui l’imprime en rouge. Le troisième enfin, celui conservé par le Musée, est publié dans le premier volume du Livre des Masques.
Ces trois portraits ont pour particularité d’avoir été dessinés d’après le modèle, alors que Vallotton travaille le plus souvent d’après photographie. La séance de pose – probablement leur première rencontre – est fixée par Mallarmé à son domicile le 2 mars 1895: «Cher Monsieur Vallotton, Je vous réponds un peu du fond d’un rhume cloaqueux, dont ma tête n’émerge pas encore suffisamment pour que je vous l’offre; mais je suppose que je serai […] ratissé, mouché pour la journée de Samedi.»