Giuseppe Penone
Svolgere la propria pelle (Pressione su carta), 1974

  • Giuseppe Penone (Garessio, 1947)
  • Svolgere la propria pelle (Pressione su carta), 1974
  • Graphite et ruban adhésif sur papier marouflé sur toile, 130 x 160 cm
  • Donation d’Alice Pauli, 2018
  • Inv. 2018-026
  • © Musée cantonal des Beaux-Arts de Lausanne

Au début des années 1970, le benjamin de l’Arte povera, âgé d’à peine vingt-cinq ans, développe une série de travaux consistant littéralement à mettre son corps à plat : il l’applique sur des plaques de verre, les photographie, puis assemble ces fragments en une grande composition. Rapidement, il passe à la reproduction de morceaux de sa peau agrandis par les moyens du dessin sur du papier, voire sur des murs entiers. L’un de ses thèmes favoris est aujourd’hui encore l’empreinte (souvent invisible) laissée par le corps humain dans la nature.

Le centre de la composition de Svolgere la propria pelle (développer sa propre peau) est bien marqué par un petit rectangle noir. Il s’agit d’un ruban adhésif transparent portant l’empreinte d’une partie de peau de l’artiste préalablement enduite de poudre de graphite. Après avoir réalisé ce décalque, Penone l’utilise comme le point de départ de la composition. Il agrandit cette « dermato-graphie » avec un crayon gras. Il résulte de cette Pressione sur carta (pression sur papier) un dessin à fleur de peau qui ressemble à une écorce ou à un paysage. Svolgere… est un paysage personnalisé. Grâce à un choix pertinent des matériaux – le graphite pour le monde minéral et le papier pour le monde végétal – et des techniques – l’empreinte directe (adhésif) et indirecte (dessin-pression) –, l’artiste intègre l’homme à ses différents environnements, relie microcosme et macrocosme, et crée un monde poétique de relations complexes.

L’artiste italien met en valeur la peau, écran qui enregistre les sensations les plus fines et qui en même temps laisse des empreintes, et fait de la perception tactile un mode de perception privilégié, alors que l’œil est au centre de l’art occidental. À travers ses œuvres, Penone nous aide aujourd’hui, dans un monde tendant à la dématérialisation, à retrouver le contact physique avec la nature.

Bibliographie

Bernard Fibicher (dir.), Giuseppe Penone. Regards croisés, cat. exp. Lausanne, Musée cantonal des Beaux-Arts, Milan, 5 Continents Editions, 2015.

Laurent Busine (dir.), Giuseppe Penone, Arles, Actes Sud, 2012.

Françoise Jaunin, Giuseppe Penone : le regard tactile [entretiens], Lausanne, La Bibliothèque des Arts, 2012.