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La collectionBibliographie
Itamar Gov, « Reevaluating Historical Narratives as a Means of Liberation », in Yael Bartana. Pre-Enactments, cat. exp. Bombay, Gallery MMB – Gœthe-Institut/Max Mueller Bhavan, 2017, n. p.
Nicole Schweizer (éd.), Yael Bartana, Lausanne, Musée cantonal des Beaux-Arts, Zurich, JRP Ringier, 2017.
Depuis ses premières vidéos réalisées au tournant des années 2000, Bartana construit un œuvre qui oscille entre approche documentaire et construction fictionnelle d’événements historiques, voire d’utopies politiques. Son travail témoigne d’une fascination pour les cérémonies et les rituels sociaux, et pour le rôle que jouent ces derniers dans la construction des communautés et des individus.
L’installation vidéo Tashlikh (Cast Off) emprunte son titre au rituel du tashlikh pratiqué à l’occasion du Nouvel An juif, et qui consiste à jeter de petits morceaux de pain ou des objets dans un cours d’eau afin de se libérer symboliquement des péchés de l’année écoulée tout en se préparant à l’année à venir. La vidéo se présente ainsi comme une sorte d’invitation à une cérémonie collective de tashlikh, ou du moins comme la documentation d’un tel événement.
Filmés au ralenti sur un fond noir, des objets tombent lentement, à des rythmes différents, isolés ou non, accompagnés d’une bande-son lancinante (bruit de vent ou de ressac, vrombissement d’avion ou de sirène, voix qui décompte) et, par moments, en silence. Gilet de sauvetage, photographies, lettres, journaux, châle de prière, uniformes, fusil, étoiles jaunes, drapeaux, vaisselle, les objets relèvent à la fois de la sphère intime tout en appartenant à un contexte plus large. Chacun d’entre eux représente un traumatisme collectif (le génocide arménien, les guerres civiles érythréennes, l’Holocauste, la Nakba). Les victimes, cependant, ne sont pas les seules à raconter leur histoire : les bourreaux participent eux aussi à la cérémonie du tashlikh. Mais si les objets sont la trace tangible d’une histoire, ou de toutes ces histoires, ils deviennent aussi les protagonistes d’un moment fictionnel mis en scène par l’artiste. Dans ce sens, Tashlikh (Cast Off) s’inscrit dans le questionnement sur la construction des identités individuelles et de la mémoire collective qui traverse tout le travail de Bartana.