Sophie Calle
The Sleepers (Antoine Gonthier, Twentieth Sleeper, and Patrice X., Twenty-First Sleeper), 1979

  • Sophie Calle (Paris, 1953)
  • The Sleepers (Antoine Gonthier, Twentieth Sleeper, and Patrice X., Twenty-First Sleeper), 1979
  • Série de 9 photographies noir/blanc et 1 texte encadrés, 15,6 x 20,4 cm (chaque élément), éd. 1/3
  • Acquisition, 1998
  • Inv. 1998-020
  • © Musée cantonal des Beaux-Arts de Lausanne

Adossé contre un traversin et une pile d’oreillers, au chaud sous des couvertures, Patrice X., un garçon de quatorze ans, sourit à la photographe avec une timidité manifeste : sa tête est légèrement inclinée et sa main droite agrippe son poignet gauche, comme en posture de repli. La lumière artificielle crée de forts effets de contraste. Il est passé minuit et Patrice s’apprête à se coucher. Il attend le frère de Calle, Antoine Gonthier, qui doit le rejoindre pour la nuit. Ce portrait, accompagné d’une légende manuscrite strictement factuelle, donne à voir une situation d’intimité. Dans cette première œuvre, Calle met en place les ressorts de son travail à venir : application de règles de jeu claires, simulation du réel, production de récits, documentation.

Cette photographie est tirée d’une édition réduite de la série The Sleepers (version anglaise des  Dormeurs) qui atteste une expérience de vie et qui sera archivée sous la forme de cent-septante-six photographies et de textes : du 1er au 9 avril 1979, Calle accueille vingt-huit personnes venues dormir chez elle à son invitation. Ce sont autant des amis que des inconnus, des gens de tous métiers et de tous âges, qui se succédèrent dans le lit de celle qui ne se qualifie pas encore d’artiste. La seule consigne donnée est d’y demeurer huit heures et de se laisser photographier et observer. Calle prend des notes sur les moments passés avec ses hôtes et engage parfois la conversation avec eux, comme c’est le cas ici avec Patrice et Antoine, qu’elle questionne sur leur sommeil et sur leurs rituels au moment de se mettre au lit.

Au-dessus de la tête de Patrice, on observe une collection d’images de lits, de tentures et de corps nus allongés. Calle nous rappelle que le dormeur est un motif de l’histoire de l’art, tout en le mettant en abyme.

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Bibliographie

Christine Macel (dir.), Sophie Calle. M’as-tu vue ?, cat. exp. Paris, Éditions du Centre Pompidou, 2003.

Sophie Calle, Les Dormeurs, 2 vol., Arles, Actes sud, 2000.

Catherine Lepdor, Paul Müller et alii, Le Sommeil ou quand la raison s’absente, Les Cahiers du Musée des Beaux-Arts de Lausanne no 9, 1999, p. 72-74, no 45.