Bibliographie
Klaus Albrecht Schröder (éd.), Eric Fischl. Friends, Lovers and other Constellations, cat. exp. Vienne, Albertina, 2014.
Erika Billeter, Helle Crenzien et alii, Eric Fischl, cat. exp. Aarhus, Aarhus Kunstmuseum, Humlebæk Louisiana Museum for Moderne Kunst, Aarhus, Aarhus Kunsmuseums Forlag, 1991.
Erika Billeter (éd.), Eric Fischl. Bilder und Zeichnungen/Peintures et dessins, cat. exp. Lausanne, Musée cantonal des Beaux-Arts, Lausanne, Vienne, Akademie der Bildenden Künste, 1990.
Une femme est penchée vers le sol, curieusement affairée, tandis qu’un chien se tient en observateur à l’écart. Les deux protagonistes semblent partie prenante d’un même moment que l’on ne saurait situer dans la journée, tant les ombres et les lumières semblent se contredire.
Fischl orchestre ici une rencontre improbable, dans un lieu et un temps indéterminés, en jouant d’une gamme de couleurs réduite et en articulant trois éléments : selon un principe d’assemblage de calques qu’il applique dans certains de ses dessins, il a créé sa composition en juxtaposant deux images (et donc, deux matrices), auxquelles il a ajouté une troisième plaque à des fins chromatiques – une simple zone lumineuse produisant un éclairage artificiel. La technique de l’aquatinte a été choisie parce qu’elle permet de travailler au pinceau mais surtout d’obtenir des effets de transparence.
Ce travail de montage a de nombreuses incidences. L’ombre du chien est insolite, suturant les deux calques ; elle entre par ailleurs en contradiction avec celle de la femme. La position de la bête conduit le spectateur à projeter une relation imaginaire entre les deux protagonistes. Le parallélisme entre les deux figures, qui se succèdent dans la profondeur, renforce le caractère animal de la femme dont le corps se réduit presque à une masse de chair surmontée d’une tête chevelue.
La scène provoque un sentiment d’étrangeté par son artificialité plus que par l’obscénité que suggère cependant la vision du chien scrutant de derrière une femme pliée en deux. Ce registre est souvent exploité par Fischl. À l’instar de son compatriote Philip Pearlstein, l’artiste peint fréquemment des corps dévêtus, dans des positions triviales accentuant l’opulence des chairs, et dans un traitement hyperréaliste conférant un fort degré de réalité aux images qu’il produit. Il se plaît à décrire sur ce mode truculent les loisirs de la classe moyenne américaine, notamment les vacances à la mer et les plages fréquentées par les nudistes.