Bibliographie
Georges Didi-Huberman, « Ouvrir les temps, armer les yeux : montage, histoire, restitution », in Remontages du temps subi. L’Œil de l’histoire, t. 2, Paris, Éditions de Minuit, 2010.
Antje Ehmann et Kodowo Eshun (éd.), Harun Farocki. Against what ? Against whom ?, cat. exp. Londres, Raven Row, Londres, König Books, 2009.
Mathias Michalka (dir.), Harun Farocki – Nebeneinander, cat. exp. Vienne, Museum Moderner Kunst Stiftung Ludwig, Cologne, Walther König, 2007.
Cinéaste, vidéaste, photographe, auteur d’installations, Farocki travaille avec une rare acuité la question de l’image, notamment documentaire, et ses différents dispositifs. Né à Nový Jičín en Tchécoslovaquie, annexée à l’époque par l’Allemagne, il étudie à la Deutsche Film- und Fernsehakademie à Berlin, travaille d’abord comme réalisateur et édite la revue Filmkritik dans laquelle il développe, entre 1974 et 1984, une importante réflexion théorique sur l’image.
Dans l’installation vidéo Verlgeich über ein Drittes, que l’on peut traduire par « comparaison via un tiers », c’est la question du travail et de ses représentations qui est au centre du propos. Les conséquences des processus de rationalisation et d’automatisation sont interrogées à travers l’exemple de la production et de la transformation des briques. Farocki montre les procédés de travail dans les sociétés traditionnelles, récemment industrialisées et hautement industrialisées. Des images tournées dans des usines en Inde sont projetées seules ou côte à côte, en alternance ou confrontées à des scènes tournées dans des usines européennes. À la présentation en progression linéaire vers des procédés de fabrication de plus en plus automatisés succèdent des montages d’images qui brouillent une lecture aussi unilatérale. En s’intéressant à la comparaison des similarités et des contrastes entre des temporalités et des géographies différentes par le moyen du montage de deux images présentées simultanément, Farocki fait dialoguer des réalités qui semblaient distinctes, tout en gardant la spécificité de chacun des contextes.
Comme le formule l’artiste dans un texte de 2004, « dans une double projection, il y a à la fois succession et simultanéité, des liens d’une image à la suivante et à celle d’à côté. Des liens avec ce qui a été vu et avec ce qui est vu au même moment. Imaginez l’oscillation rapide entre les six atomes de carbone composant le cycle du benzène – c’est ce type d’ambiguïté que j’imagine être à l’œuvre dans les liens entre un élément d’une séquence d’images et celui qui le précède ou qui le suit. »